mardi 18 juillet 2017

Repose en paix Marie-Marcelle



Il est de ces gens qui par leur attitude, leur bonté, leur simplicité et leur abnégation, imposent le respect. Marie-Marcelle Godbout était l’une de ces personnes. C’est aussi l’image que l’on se fait d’une personne qui sans avoir une dévotion apparente, nous inspire la sainteté. D’ailleurs, à juste titre, plusieurs personnes considéraient Marie-Marcelle comme la mère Thérésa des trans du Québec.

Elle a en effet passé plus de la moitié de sa vie à aider les trans. Après la mort d’une de ses amies trans, elle s’était jurée de faire tout en son possible pour en sauver le plus possible de l’attrait du suicide et de la dépression que peut induire la prise de conscience qu’on n’est pas comme tout le monde, qu’on est pas né dans le bon sexe. Elle fonda donc l’ATQ (Aide aux transsexuel(les) du Québec) et s’occupait de la ligne d’écoute 24/24 pour les personnes en questionnement d’identité de genre. Elle était LE pilier de cette communauté souffrante et elle est responsable du non-suicide de milliers de personnes. Jour et nuit elle était disponible pour réconforter, rassurer, diriger vers des ressources et donner elle-même l’exemple qu’on pouvait être trans et avoir une vie heureuse. Elle disait même souvent que si elle avait à choisir sa vie, ce serait exactement la vie qu’elle a vécu qu’elle choisirait. Elle était fière d’être trans et ne se gênait pas pour le dire.

Si je suis capable de vous écrire ce mot aujourd’hui, c’est parce que je suis encore là et que j’ai été en partie sauvée par Marie-Marcelle. Lorsque mes mécanismes de négation m’ayant permis de me faire croire que j’étais un homme pour la plus grande portion de ma vie sont tombés, c’est elle qui m’a fait voir la lumière au bout du tunnel. C’est elle qui m’a aidé à relativiser « mon drame » et qui a échangé avec ma conjointe pour la rassurer que notre amour était encore possible.

Elle a été la première personne à démystifier l’état de trans dans les médias au Québec. Avec Janette Bertrand, Denis Lévesque et tant d’autres intervieweurs médiatiques, elle a pris son bâton de pèlerin et avec douceur et gros bon sens, elle expliquait comment les trans étaient des gens comme tout le monde et qu’ils méritaient le respect. Elle a été de toutes les batailles des trans et tous les ministres de la justice requéraient son opinion pour faire avancer les droits des trans. Son dernier combat aura été celui des droits des trans du 3e âge à vivre eux aussi leur vieillesse dans la dignité et en sécurité.

Au fil des ans, je l’ai vu interagir avec d’innombrables personnes. Comme dans la population en général, chez les trans il y a des professionnels, des gens de peu d’instruction, des prostitués, des gens atteints de maladie mentale et au début de la transition tous et toutes sont en détresse profonde. Elle les accueillait tous avec ouverture, s’intéressait à leur histoire, les écoutait et interagissait avec son cœur et sans jugement.

Durant 37 ans elle a fait ça gratuitement, sans aucune aide gouvernementale et aux frais de son conjoint et des dons des trans eux(elles)-mêmes. Rares sont les trans qui n’ont pas un jour téléphoné ou rencontré Marie-Marcelle. Elle était le phare des âmes qui se cherchent.

Je souhaite vivement un jour arriver à la moitié de sa bonté et de son altruisme. Marie-Marcelle tu vas me manquer. Tu me manque déjà. Mes plus sincères condoléances à sa famille et à tous(tes) les trans du Québec…